le modèle italien
Alvarez - 1924

la loi du plus fort

Dès les premières marches, je comprends qu'ici, il n'y aura rien pour moi. L'escalier est de marbre noir, la façade entièrement vitrée, le hall d'une hauteur vertigineuse. Il y a aussi quelques murs recouverts de matériaux insolites, de subtils éclairages indirects et bien d'autres trouvailles qui font de ce Palais une incontestable réussite architecturale. Béton brut par-ci, faux parquet par-là, cela sent même le cahier des charges respecté, l'élégance du gestionnaire. Une grande réussite au service d'une grande idée que tout rappelle : les noms pontifiants, la religiosité du cérémonial, les robes noires, le vocabulaire sophistiqué. Je plonge dans un univers où chaque élément est nommé, mesuré, codifié. Les règles sont précises, les rôles de chacun délimités, les procédures bien établies. Les dossiers suivent leur cours, au rythme des articles de loi, des audiences, des reports, le tout dans un jeu bien huilé réservé aux initiés, avec ses coups bas et ses rebondissements. Pas de temps à perdre, on décortique, on catégorise, on suit les barèmes. De l'invisible ? Pensez-vous, il y a les experts pour cela. Ils sauront mieux que vous apprécier votre douleur. Pas de petits échanges ni de sourires car dans le fond, la vérité n'arrange personne. D'un côté les avocats font leurs plaidoiries, de l'autre les juges appliquent les textes. Cela fait penser aux rites funéraires dont on pourrait penser qu'ils sont faits pour les morts alors qu'en réalité ils s'adressent aux vivants. Ici, il en va de même. La véritable préoccupation porte sur la société et ses rouages, non sur la souffrance des victimes. Comme elles n'y connaissent rien, il est préférable qu'elles se taisent. Voilà pourquoi tout sonne faux. A l'image de cette grande idée, de ce grand bâtiment. On se croirait dans un théâtre, une pièce de Tchekhov sponsorisée à coup de salaires mirobolants, une scène surréaliste où, dans mon propre rôle, je voudrais leur dire : « Votre Honneur, Messieurs les jurés, Maîtres avocats, vous autres scribouillards, vous m'avez exclu de ces lieux avant même que j'y pénètre. Votre système totalitaire fait des victimes de nouvelles victimes. En misant sur les faits, vous vous êtes trompés de réalité. J'aurais été tellement plus à l'aise sur un coin de table, dans une cuisine, près d'un poêle, pour parler de tout cela. Il y avait un homme, vivant de tout son être, celui des vestes en laine, des chemins de terre, des jours de pluie, de ces petits coins de table le soir près du feu. Il voulait dire, il voulait comprendre, il voulait aimer, il aurait même voulu pardonner ».
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